Procès Sankara : Responsable de la sécurité des lieux du drame, Gilbert Diendéré plaide non coupable

La première journée d’audition du général Gilbert Diendéré dans le procès de l’assassinat de Thomas Sankara n’a pas véritablement contribué à l’avancée du débat ouvert depuis quelques semaines, l’accusé n’ayant rien voulu reconnaître des faits qui lui sont reprochés.

Le témoignage très attendu d’un des personnages-clés du dossier de l’assassinat du Président Thomas Sankara a commencé, ce mardi 9 novembre. En dehors de Blaise Compaoré et de Hyacinthe Kafando, le général Gilbert Diendéré fait figure de personnage central pouvant fournir des éléments importants sur le drame qui s’est joué dans les locaux du Conseil de l’entente, dans l’après-midi du jeudi 15 octobre 1987.

Mais comme beaucoup avant lui, Gilbert Diendéré ne sait rien, n’a été au courant de rien et a été surpris de l’attaque dont furent victimes le Président du Faso et 12 de ses compagnons, dans l’un des lieux présentés comme les plus sécurisés du pays et qui justement étaient sous sa responsabilité.

L’ex-chef d’état-major particulier de Blaise Compaoré rejette les quatre chefs d’accusation retenus contre lui, et qu’il partage d’ailleurs avec son ancien patron, à savoir : complicité d’assassinat, d’attentat à la sûreté de l’État, de recel de cadavres et de subornation de témoins. L’accusé a affirmé être au sport lorsqu’il a entendu les coups de feu et a dû se rendre au Conseil de l’entente pour s’enquérir de ce qui se passait. Sur place, il a pu identifier parmi les tireurs Arzouma Ouédraogo alias Otis et Nabié N’Soni.

«J’ai vu les corps. J’ai reconnu Sankara de loin dans sa tenue de sport. J’ai dit : “Qu’est-ce que vous avez fait comme ça ?” Ils m’ont dit que le Président Sankara voulait arrêter leur chef (Blaise Compaoré, ndlr), donc eux, ils l’ont devancé», a narré Diendéré à la barre.

«J’ai demandé si leur chef était au courant de ce qui s’est passé. Ils disent qu’ils s’en foutent, et je me suis retourné pour appeler le commandant Lingani pour rendre compte de ce que j’ai vu et entendu », a poursuivi Gilbert Diendéré. À la question de savoir comment ont été gérés les cadavres des 13 hommes tués, Gilbert Diendéré affirme n’y avoir pas été associé. «C’est le régisseur de la MACO (Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou), Tapsoba Karim, qui est venu avec les prisonniers pour récupérer les corps.

C’est lui que le commandant Lingani aurait appelé pour le faire. Mais je n’ai pas été informé ni de l’enlèvement ni de l’enterrement. C’est le matin que Karim est revenu avec la liste de ceux qu’il a enterrés là-bas».

Gilbert Diendéré a également cité Hyacinthe Kafando parmi les donneurs d’ordre dans les événements du 15 octobre, tout en précisant que le chef de la sécurité de Blaise Compaoré a réussi à fuir grâce à l’appui de l’ancien Premier ministre de la transition, Yacouba Isaac Zida. En somme, était à la barre, ce mardi 9 novembre, un responsable de la sécurité du Conseil de l’entente, qui ne contrôlait visiblement rien, qui a été pris de court comme n’importe quel quidam et qui, même après le drame, n’a pu interpeller la moindre personne parmi les assassins.

Comme justificatif de son inaction, Gilbert Diendéré déclare : «Est-ce que je peux aller dire à ces gens-là “Messieurs les assaillants, vous êtes en état d’arrestation. Vous avez droit à des avocats” ? Dans cette situation, je ne savais pas qui était qui. Le moindre faux pas pouvait faire que je sois la quatorzième victime. Et j’allais avoir mes avocats de ce côté», s’est-il justifié, en désignant du regard le banc des avocats de la partie civile.

Puis, il ajoute : «Si je pouvais les arrêter, est-ce que vous pensez que des gens qui ont abattu le Président du Faso et douze autres personnes allaient se laisser faire ? Ils allaient résister. Il y aurait eu des coups de feu et plusieurs morts. Et je ne serais pas là pour répondre de treize morts, mais de cinquante morts».

Il faut préciser que ce mardi, la tension était palpable au tribunal au point où le président a dû suspendre l’audience pour quelques minutes, avant qu’elle ne reprenne, à 14 heures.

Les travaux ont finalement été arrêtés aux environs de 16 heures et se poursuivront ce mercredi, avec le même accusé à la barre.

Alain BOUBAKAR

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